Climat: l’importance de quelques degrés de plus

NEW YORK — Sur un thermomètre, quelques dixièmes de degrés semblent insignifiants, à peine dignes d’être remarqués. Mais de petits changements à la température moyenne peuvent avoir des répercussions sur le climat de la planète, donnant naissance à des catastrophes énormes au moment où la météo devient plus humide et plus instable dans un monde plus chaud.

En 2015, les pays du monde se sont entendus pour réduire les émissions de gaz à effet de serre afin de limiter le réchauffement planétaire à «bien moins» que 2 degrés Celsius et pour poursuivre une cible de 1,5 degré Celsius dans le cadre de l’Accord de Paris.

Deux degrés ne font peut-être pas une grosse différence si vous mettez le nez dehors, mais pour les températures mondiales moyennes, ces petits chiffres ont un impact démesuré.

«Chaque dixième de degré est important», martèlent les climatologues de la planète.

La Terre s’est déjà réchauffée d’au moins 1,1 degré Celsius par rapport à l’ère pré-industrielle, ne laissant au monde qu’un réchauffement supplémentaire de 0,4 degré avant de surpasser l’objectif de Paris et de s’exposer à un changement encore plus catastrophique du climat, préviennent les chercheurs.

Ces dixièmes de degrés sont importants parce que les températures représentent une moyenne du réchauffement mondial. Quelques régions du monde, surtout les terres émergées et les latitudes nordiques comme l’Arctique, se sont déjà réchauffées de plus que la moyenne de 1,1 degré Celsius et ont une marge de manœuvre beaucoup plus étroite avant d’atteindre 1,5 degré, expliquent des spécialistes.

Il est utile de voir les températures comme une courbe de distribution normale, au lieu de simplement considérer une moyenne qui ne dévoile pas les «extrêmes cachés», a dit Gabe Vecchi, un climatologue de l’université de Princeton.

«Au bout, où la courbe est très étroite, ça nous montre les possibilités d’événements très extrêmes, a-t-il expliqué. Si on a un léger glissement de la moyenne du sommet de cette courbe en direction du réchauffement, ça nous donne une diminution importante de la possibilité de températures extrêmement froides et une augmentation importante des possibilités de températures extrêmement chaudes.»

Il en va de même pour la hausse du niveau des mers, où la moyenne camoufle la réalité que certains endroits sont victimes d’une augmentation plus importante que d’autres, a-t-il dit.

La majorité des nations ― y compris les deux principaux pollueurs, les États-Unis et la Chine ― ne sont pas en voie de limiter le réchauffement à 1,5 degré ou 2 degrés, selon les experts, en dépit de leurs promesses.

Si la température grimpe d’environ deux degrés Celsius de plus d’ici la fin du siècle, la planète sera frappée par cinq fois plus d’inondations, de tempêtes, de sécheresses et de canicules, selon les estimations du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat.

Personne ne sait comment le climat réagirait à un réchauffement encore plus prononcé, a dit Kim Cobb, une climatologue de l’université Brown. La menace de changements irréversibles et de boucles qui amplifient le réchauffement, comme la fonte du pergélisol qui emprisonne des quantités gigantesques de gaz à effet de serre, pourrait provoquer un réchauffement encore plus important.

«Ça défie l’imagination de penser au nombre de gens qui seront menacés dans l’immédiat par des extrêmes climatiques dans un monde à deux degrés», a dit Mme Cobb.