Certains groupes de détenus sont défavorisés, conclut la vérificatrice générale

OTTAWA — La vérificatrice générale affirme que le service pénitentiaire du Canada n’a pas donné aux détenus un accès rapide aux programmes correctionnels pour les aider à réintégrer la société, y compris des cours spécifiques pour les femmes, les Autochtones et les membres des minorités visibles.

Le bureau de Karen Hogan a constaté notamment que les détenus autochtones et noirs «se sont heurtés à un plus grand nombre d’obstacles sur la voie d’une réinsertion sociale sécuritaire et progressive que les autres groupes de détenus».

Dans son rapport déposé mardi, Mme Hogan note que son bureau avait soulevé des problèmes similaires en 2015, en 2016 et en 2017, mais elle constate que Service correctionnel Canada a peu fait depuis pour modifier ses politiques, ses pratiques, ses approches et ses outils.

Mme Hogan note que des disparités sont présentes dès le moment où les délinquants entrent dans les établissements fédéraux.

Le processus de classification des «cotes de sécurité» a ainsi vu les délinquants autochtones et noirs placés dans des établissements à sécurité maximale deux fois plus que les autres groupes de délinquants.

Ces populations sont également restées en détention fédérale plus longtemps et à des niveaux de sécurité plus élevés avant leur libération.

«Cette constatation est importante parce que le placement initial par niveau de sécurité des délinquants a des répercussions sur leurs possibilités de libération conditionnelle et la durée de leur détention», souligne Mme Hogan dans le rapport.

La vérificatrice a aussi constaté que l’accès «en temps opportun» aux programmes correctionnels continuait de diminuer pour tous les groupes de délinquants. Qui plus est, l’accès à ces programmes s’est détérioré encore davantage pendant la pandémie de COVID-19.

Ainsi, parmi les hommes qui purgeaient des peines de deux à quatre ans de prison et qui ont été libérés d’avril à décembre 2021, 94 % n’avaient pas terminé les programmes correctionnels dont ils avaient besoin avant d’être admissibles pour la première fois à la semi-liberté. «Il s’agit d’un obstacle qui les a empêchés de purger le reste de leur peine dans la collectivité sous surveillance», déplore la vérificatrice générale.

Diversité dans la main-d’oeuvre

Par ailleurs, les efforts de Service correctionnel Canada pour favoriser une plus grande équité, diversité et inclusion en milieu de travail «n’ont pas été suffisants, ce qui a permis à des obstacles de perdurer». Ainsi, près du quart des membres de la direction et du personnel n’avaient toujours pas suivi la formation obligatoire sur la diversité un an après la date butoir, note le rapport.

De plus, le Service correctionnel n’avait pas établi de plan ni de calendrier pour constituer une main-d’œuvre qui reflète la diversité de ses populations de détenus, ce qui est particulièrement pertinent pour les établissements comptant un nombre élevé de délinquants autochtones et noirs, indique le rapport.

Mme Hogan souligne que le Service correctionnel a reconnu en novembre 2020 qu’il y avait du racisme systémique et il a lancé un cadre de lutte contre le racisme afin de recenser et de supprimer les obstacles systémiques, «en mettant l’accent sur le personnel et les délinquants».

Dans sa réponse au rapport, le Service correctionnel a accepté de donner suite aux recommandations de la vérificatrice générale afin de remédier aux différents problèmes identifiés.

Le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, a souligné les efforts visant à «éradiquer le racisme sous toutes ses formes» en diversifiant la main-d’œuvre du service pénitentiaire, en améliorant la formation et en collectant des données pour éclairer les politiques. «Et nous savons que nous avons un long chemin à parcourir», a-t-il affirmé.

M. Mendicino a souligné qu’il avait récemment demandé à la commissaire du service correctionnel de créer un nouveau poste de sous-commissaire pour les services correctionnels pour Autochtones, affirmant que cela garantirait que l’enjeu de la surreprésentation des délinquants autochtones dans le système, en particulier les femmes, soit traité.