Joe Biden confirme la mort du chef d’Al-Qaïda et déclare que «justice a été rendue»

WASHINGTON — Le président Joe Biden a confirmé lundi qu’une frappe de drone de la CIA en Afghanistan a tué ce week-end le chef d’Al-Qaïda, Ayman al-Zawahiri, déclarant que «justice a été rendue».

Cela marque une victoire importante dans la lutte contre le terrorisme, onze mois seulement après le départ des troupes américaines du pays, au terme d’une guerre de deux décennies.

M. Biden a fait savoir que des responsables du renseignement américain avaient suivi Ayman al-Zawahiri jusqu’à une maison du centre-ville de Kaboul où il se cachait avec sa famille. Le président a approuvé l’opération la semaine dernière et elle a été réalisée dimanche.

«Ce chef terroriste n’est plus», a déclaré M. Biden dans un discours du soir depuis la Maison-Blanche.

M. Biden devait parler depuis le balcon de la salle bleue de la Maison-Blanche, car il reste isolé dans la résidence en raison de tests positifs à la COVID-19.

Joe Biden a exprimé l’espoir lundi que l’assassinat du chef d’Al-Qaïda Ayman al-Zawahri apporte du réconfort supplémentaire aux familles des victimes des attentats du 11 septembre 2001 contre les États-Unis.

«Il ne permettra plus jamais, plus jamais, à l’Afghanistan de devenir un refuge pour les terroristes parce qu’il est parti et nous allons nous assurer que rien d’autre n’arrive», a mentionné le président.

La frappe, menée par la Central Intelligence Agency (CIA), a été confirmée par cinq personnes bien au fait du dossier, qui ont parlé sous couvert de l’anonymat avant que M. Biden ne soit chargé d’informer le peuple américain des détails de l’opération. 

D’ex-responsables et d’autres en fonction ont commencé à entendre des informations dimanche après-midi selon lesquelles Ayman al-Zawahiri avait été tué dans une frappe de drone, mais l’administration a retardé la publication de l’information jusqu’à ce que sa mort puisse être confirmée, selon une personne qui a parlé sous le couvert de l’anonymat.

Plus tôt, les responsables de la Maison-Blanche ont indiqué dans un communiqué que «les États-Unis ont mené une opération antiterroriste contre une cible importante d’Al-Qaïda en Afghanistan. L’opération a été un succès et il n’y a pas eu de victimes civiles.»

Une équipe américaine au sol était présente en Afghanistan pour soutenir la frappe et s’est depuis retirée, a déclaré un haut responsable du renseignement.

Selon lui, la maison dans laquelle se trouvait Ayman Al-Zawahri lorsqu’il a été tué appartenait à un haut collaborateur du chef taliban Sirajuddin Haqqani. Le responsable a également ajouté qu’une équipe au sol de la CIA et une reconnaissance aérienne effectuée après l’attaque du drone ont confirmé la mort d’Ayman Al-Zawahri. La planification de l’opération a débuté il y a six mois, mais s’est intensifiée au cours des deux derniers mois, a précisé le responsable.

La perte d’Ayman Al-Zawahri élimine la figure, qui plus que quiconque, a façonné Al-Qaïda, d’abord en tant qu’adjoint d’Oussama ben Laden depuis 1998, puis en tant que son successeur. Ensemble, Oussama ben Laden et lui ont tourné les armes du mouvement djihadiste pour cibler les États-Unis, menant l’attaque la plus meurtrière jamais perpétrée sur le sol américain – les attentats du 11 septembre 2001.

Le premier ministre Justin Trudeau a réagi en fin de soirée à la mort d’Ayman al-Zawahiri. Sur les réseaux sociaux, il a écrit que sa disparition était un pas vers un monde plus sécuritaire. 

Il a ajouté qu’avec ses partenaires,  »le Canada va continuer à contrer les menaces terroristes, promouvoir la paix et la sécurité et protéger les gens ici et à l’étranger ».

Retrait des États-Unis

Au cours des 20 ans de guerre en Afghanistan, les États-Unis ont ciblé et divisé Al-Qaïda, envoyant ses dirigeants dans la clandestinité. Mais le retrait des États-Unis d’Afghanistan en septembre dernier a donné au groupe extrémiste l’occasion de se reconstruire.

Des responsables militaires américains, dont le chef d’état-major américain, général Mark Milley, ont déclaré qu’Al-Qaïda tentait de se reconstituer en Afghanistan, où il faisait face à des menaces limitées de la part des talibans désormais au pouvoir. Les chefs militaires ont averti que le groupe aspirait toujours à attaquer les États-Unis.

Les attentats contre le World Trade Center et le Pentagone ont fait d’Oussama ben Laden l’ennemi numéro un de l’Amérique. Mais il n’aurait probablement jamais pu le faire sans son adjoint. Oussama ben Laden a fourni à Al-Qaïda du charisme et de l’argent, mais Ayman al-Zawahri a apporté les tactiques et les compétences organisationnelles nécessaires pour forger des militants dans un réseau de cellules dans des pays du monde entier.

Leur lien s’est forgé à la fin des années 1980, lorsque Ayman al-Zawahri aurait soigné le millionnaire saoudien dans les grottes d’Afghanistan alors que les bombardements soviétiques secouaient les montagnes qui les entouraient.

Ayman al-Zawahri figurait sur la liste des terroristes les plus recherchés du FBI. Il y avait une prime de 25 millions de dollars sur sa tête pour toute information pouvant être utilisée pour le tuer ou le capturer.

S’exprimant le 31 août 2021, après le départ des dernières troupes américaines d’Afghanistan, Joe Biden a déclaré que les États-Unis ne relâcheraient pas leur lutte contre le terrorisme dans ce pays ou ailleurs.

«Nous maintiendrons la lutte contre le terrorisme en Afghanistan et dans d’autres pays, a-t-il dit. Nous n’avons tout simplement pas besoin de mener une guerre terrestre pour le faire.» À propos de la frappe qui allait se produire 11 mois plus tard, M. Biden avait déclaré à l’époque : «nous avons ce qu’on appelle des capacités transhorizon, ce qui signifie que nous pouvons frapper des terroristes et des cibles sans que (des Américains) ne soient présents sur le terrain – ou très peu, si nécessaire.»

Il y a eu des rumeurs sur la mort d’Ayman al-Zawahri pendant plusieurs années, mais une vidéo a fait surface en avril, montrant le chef d’Al-Qaïda qui faisait l’éloge d’une femme musulmane indienne qui avait défié l’interdiction de porter un hijab ou un foulard. Cette séquence était la première preuve depuis des mois qu’il était toujours en vie.

Une déclaration du gouvernement taliban afghan a confirmé la frappe aérienne, mais n’a pas fait mention d’Ayman al-Zawahri ni aucune autre victime.

La déclaration «condamne fermement cette attaque et la qualifie de violation claire des principes internationaux et de l’accord de Doha», le pacte américain de 2020 avec les talibans qui a conduit au retrait des forces américaines.

«De telles actions sont une répétition des expériences ratées des 20 dernières années et vont à l’encontre des intérêts des États-Unis d’Amérique, de l’Afghanistan et de la région», indique la déclaration. 

Différences idéologiques

Lorsque l’invasion américaine de l’Afghanistan en 2001 a démoli le refuge d’Al-Qaïda, puis dispersé, tué et capturé ses membres, Ayman al-Zawahri a assuré la survie du réseau islamique. Il a reconstruit son leadership dans la région frontalière afghano-pakistanaise et a installé des alliés comme lieutenants à des postes clés.

Il a également transformé l’organisation, notamment en dirigeant la mise en place d’un réseau de branches autonomes dans toute la région, entre autres en Irak, en Arabie saoudite, en Afrique du Nord, en Somalie, au Yémen et en Asie. 

Al-Qaïda a inspiré ou directement participé à des attentats dans toutes ces régions ainsi qu’en Europe, au Pakistan et en Turquie, notamment les attentats à la bombe dans les trains à Madrid en 2004 et dans les transports en commun à Londres en 2005.

Plus récemment, la filiale d’Al-Qaïda au Yémen s’est montrée capable de préparer des attentats en sol américain avec une tentative d’attentat à la bombe contre un avion de ligne américain en 2009 et une tentative d’attentat avec un colis piégé l’année suivante.

Mais même avant la mort d’Oussama ben Laden, Ayman al-Zawahri avait du mal à maintenir la pertinence d’Al-Qaïda dans un Moyen-Orient en mutation.

Lors de la vague de soulèvements qui s’est propagée dans le monde arabe à partir de 2011, il a exhorté les islamistes purs et durs à prendre le pouvoir dans les pays où les dirigeants étaient tombés. 

Même si les islamistes ont gagné en importance dans de nombreux endroits, ils ont des différences idéologiques marquées avec Al-Qaïda et rejettent son programme et son leadership.