Les démocrates en Chambre accusent les pétrolières d’«arnaquer le peuple américain»

WASHINGTON — Les démocrates à la Chambre des représentants ont accusé mercredi les compagnies pétrolières d’«arnaquer le peuple américain» et de faire passer les bénéfices avant la production, alors que les Américains souffrent de la hausse constante des prix de l’essence pendant la guerre en Ukraine.

«À une époque de bénéfices records, les grandes pétrolières refusent d’augmenter leur production pour apporter aux Américains un soulagement bien nécessaire à la pompe», a déclaré le représentant démocrate du New Jersey Frank Pallone, président du Comité de l’énergie et du commerce.

Les dirigeants du secteur pétrolier, témoignant devant le Congrès pour la deuxième fois en six mois, ont répondu que le marché du pétrole est mondial et que les pétrolières ne dictent pas les prix. «Nous ne contrôlons pas les prix du marché du brut ou du gaz naturel, ni des produits raffinés comme l’essence et le diesel, et nous n’avons aucune tolérance pour les prix abusifs», a assuré le PDG de Chevron, Michael Wirth.

L’audience au Congrès américain intervient alors que le président Joe Biden a ordonné la libération d’un million de barils de pétrole par jour de la réserve stratégique du pays, pendant six mois, dans le but de contrôler les prix de l’énergie, qui ont grimpé alors que les États-Unis et leurs alliés ont imposé des sanctions sévères contre la Russie pour son invasion de l’Ukraine.

Le prix national moyen de l’essence était mercredi de 4,16 $ US le gallon (1,10 $ le litre), contre 2,87 $ (0,76 $ le litre) il y a un an, selon l’Association américaine des automobilistes (AAA).

M. Biden et d’autres démocrates ont blâmé le président russe, Vladimir Poutine, et l’industrie pétrolière américaine pour cette augmentation, citant des informations selon lesquelles les compagnies pétrolières ont réalisé des bénéfices records ces derniers mois, alors que les prix ont augmenté après l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

«C’est la hausse des prix de Biden», a répliqué la représentante républicaine Cathy McMorris Rodgers, de l’État de Washington, qui siège au sein du comité.

Notant que les prix augmentaient déjà avant que la Russie n’envahisse l’Ukraine, fin février, Mme McMorris Rodgers a déclaré que les Américains «sont trop intelligents et ne sont pas tombés dans le panneau» du président Biden et d’autres démocrates. Elle a qualifié l’audience de mercredi de «purement politique».

77 milliards $ de bénéfices l’an dernier

Le PDG d’ExxonMobil, Darren Woods, a déclaré que son entreprise avait interrompu ses investissements en Russie et se retirait de ses activités dans ce pays. La société augmente sa production aux États-Unis, a déclaré M. Woods, y compris dans le «bassin permien», riche en pétrole, du Nouveau-Mexique et du Texas. ExxonMobil augmente également sa production en dehors des États-Unis, y compris «un développement de classe mondiale en Guyane», a déclaré M. Woods mercredi.

Interrogés par le représentant Pallone, M. Woods et d’autres PDG ont déclaré que les pétrolières n’avaient pas l’intention de suspendre les versements de dividendes aux actionnaires ou de restreindre les rachats d’actions qui ont enrichi les actionnaires et les dirigeants des entreprises.

Outre ExxonMobil et Chevron, les autres sociétés représentées à l’audience mercredi étaient Shell, BP, Pioneer Natural Resources et Devon Energy. Ces six sociétés ont enregistré 77 milliards $ de bénéfices l’année dernière, ont-elles déclaré mercredi.

La représentante démocrate Kim Schrier a déclaré que les prix de l’essence étaient proches de 5 $ le gallon (1,32 $ le litre) dans son district de la région de Seattle. Ses électeurs «sont furieux, avec raison», a-t-elle dit, citant les bénéfices records que les compagnies pétrolières récoltent. «Ça ressemble à de l’escroquerie. Ça ressemble même à de la spéculation», a déclaré Mme Schrier.

Les prix à la pompe n’ont pas baissé ces dernières semaines, comme l’ont fait les prix du brut, ont noté les démocrates. En temps de guerre et de prix élevés, «les compagnies pétrolières ne devraient pas retourner leurs bénéfices aux actionnaires», a déclaré Mme Schrier, exhortant les dirigeants pétroliers à rétablir la production aux niveaux d’avant la pandémie.

Les sénateurs de la côte ouest, dont la présidente du comité sénatorial du commerce, Maria Cantwell, de l’État de Washington, ont demandé à la Commission fédérale du commerce (FTC) d’enquêter sur une éventuelle manipulation des prix sur la côte ouest — l’essence à la pompe en Californie coûte plus de 6 $ le gallon (1,58 $ le litre).

La sénatrice démocrate a déclaré que les législateurs et la FTC devraient s’assurer que, comme lors de la crise énergétique de 2001 provoquée par Enron, «il n’y a pas une bande de gars intelligents dans la salle qui nuisent aux consommateurs en se disant qu’on ne peut pas comprendre ce qui se passe, de toute façon».

Le représentant républicain Tim Walberg, du Michigan, a quant à lui blâmé le président Biden pour les prix élevés de l’essence, citant l’annulation de l’oléoduc Keystone XL et un moratoire sur les nouveaux baux de forage sur les terres fédérales.

Prix du carburant: le pipeline Keystone XL évoqué

Les républicains ont ressuscité le projet d’expansion du pipeline Keystone XL, mort depuis un peu plus d’un an, dans le but de blâmer le président Joe Biden pour la flambée des prix de l’essence.

Le projet transfrontalier controversé a été annulé par le président Biden au tout premier jour de son mandat.

L’ancien conseiller à la sécurité nationale, H.R. McMaster, a déclaré que cette décision s’avérait coûteuse à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

M. McMaster a dit aux membres du comité de l’énergie de la Chambre que M. Biden a mis fin à un projet qui aurait fourni un moyen à faible impact d’augmenter les importations de pétrole et de gaz du Canada.