Incendies de forêt: une augmentation de 30 % d’ici 2050, selon un rapport de l’ONU
MONTRÉAL — Le nombre d’incendies de forêt incontrôlés pourrait augmenter de 30 % d’ici 2050 et de 50 % d’ici la fin du siècle et les gouvernements n’investissent pas assez dans la prévention.
C’est ce qu’indique un nouveau rapport du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) et du centre GRID–Arendal publié mercredi, qui met en lumière le rôle des changements climatiques et de la mauvaise gestion de l’aménagement du territoire dans l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des incendies de forêt.
Pas assez d’investissement dans la prévention
Le rapport publié en anglais seulement et intitulé «Spreading like Wildfire: The Rising Threat of Extraordinary Landscape Fires» invite les gouvernements à changer radicalement leur approche face aux incendies de forêt.
«De l’Australie au Canada, aux États-Unis à la Chine, à travers l’Europe et l’Amazonie, les incendies de forêt font des ravages sur l’environnement, la faune, la santé humaine et les infrastructures», indique le rapport.
Pour minimiser les risques liés à la santé, à l’environnement et à l’économie, les gouvernements doivent investir davantage dans la prévention, préviennent les auteurs.
«Les ripostes actuelles des gouvernements aux incendies incontrôlés placent souvent l’argent au mauvais endroit. Les travailleurs des services d’urgence et les pompiers qui sont en première ligne et qui risquent leur vie pour lutter contre les incendies incontrôlés doivent être soutenus», a déclaré Inger Andersen, directrice exécutive du PNUE.
Investir plus d’argent dans la prévention signifie par exemple qu’il faut sensibiliser les communautés à réduire les activités qui peuvent causer des incendies, comme l’exploitation forestière qui laisse parfois des débris de végétaux morts au sol.
Les forêts qui sont intentionnellement enflammées pour défricher des terres pour l’agriculture sont également responsables d’un nombre important d’incendies dévastateurs.
Les défaillances de réseaux d’électricité sont aussi données en exemple dans le rapport comme étant des causes fréquentes de début d’incendie.
«Il faut minimiser le risque d’incendies incontrôlés extrêmes en étant mieux préparés: investir davantage dans la réduction des risques d’incendie, travailler avec les communautés locales et renforcer l’engagement mondial dans la lutte contre les changements climatiques», a indiqué Inger Andersen.
Le rapport, auquel une cinquantaine d’experts ont contribué, souligne qu’au Canada, des programmes bien ciblés et des ressources allouées à combattre les feux de forêt réussissent à contenir 90 % des incendies. Cependant, 10% des feux de forêt deviennent incontrôlables et ce sont ces incendies qui contribuent le plus à la «quantité annuelle de superficies brûlées».
Pour ces incendies, «aucun équipement supplémentaire, aucune ressource ou technologie» ne peuvent permettre de contrôler le feu, «avant que la météo ne change», selon les chercheurs, d’où l’importance d’investir davantage dans la prévention et dans la résilience des communautés.
Selon le Service canadien des forêts, tous les ans, environ 7500 incendies détruisent plus de 2,5 millions d’hectares de forêt, une superficie équivalant à peu près à la moitié de la Nouvelle-Écosse.
«La restauration des écosystèmes est une solution importante pour atténuer les risques d’incendie avant qu’ils ne se produisent et pour mieux reconstruire après. La restauration des zones humides et la réintroduction d’espèces telles que les castors, la restauration des tourbières, la construction de bâtiments à distance de la végétation et la préservation des espaces tampons ouverts sont quelques exemples des investissements essentiels qui doivent être faits dans la prévention, la préparation et la récupération», écrivent les auteurs du rapport.
Un cercle vicieux
Le rapport décrit un cercle vicieux qui s’aggrave: le changement climatique entraîne davantage de sécheresse et des températures plus élevées qui facilitent le début et la propagation d’incendies, et à leur tour, ces incendies libèrent plus de carbone dans l’atmosphère lorsqu’ils brûlent à travers les forêts et les tourbières, ce qui contribue aux changements climatiques.
L’étude souligne que le changement climatique a conduit à de nombreux changements environnementaux qui peuvent augmenter la fréquence et l’ampleur des conditions météorologiques dangereuses liées aux incendies de forêt. Ainsi, l’augmentation des périodes de sécheresse, les températures élevées de l’air, de faibles taux d’humidité, des orages secs, sont autant de facteurs qui allongent les saisons des incendies.
L’augmentation de la fréquence et de l’ampleur de conditions météorologiques dangereuses provoque également de nouveaux phénomènes; des types de végétation qui ne brûlerait pas habituellement comme les forêts tropicales, le pergélisol et les marécages tourbeux sont désormais susceptibles d’êtres à l’origine d’incendies.
«Même l’Arctique, auparavant presque immunisé, est confronté à un risque croissant d’incendie de forêt», selon le rapport.
Les experts qui ont contribué au rapport prévoient une augmentation mondiale des incendies extrêmes pouvant atteindre 14 % à l’horizon 2030, 30 % d’ici à 2050 et 50 % d’ici à la fin du siècle.
Un renforcement des normes de protection
Les auteurs de l’étude demandent également aux gouvernements de renforcer «les normes internationales relatives à la sécurité et à la santé des pompiers et à la réduction des risques auxquels ils sont confrontés avant, pendant et après les opérations».
Plus précisément, ils appellent à une meilleure sensibilisation des risques d’inhalation de fumée, à minimiser les risques de situation où les pompiers peuvent être pris au piège par les flammes potentiellement mortelles et également de s’assurer que les pompiers puissent s’hydrater, se nourrir, se reposer et récupérer entre deux interventions.
Le rapport est publié quelques jours avant la cinquième session de l’Assemblée des Nations unies pour l’environnement (UNEA-5.2) qui se tiendra à Nairobi, du 28 février au 2 mars.