Le projet de loi pour encadrer le travail des enfants au Québec bien accueilli

QUÉBEC — Le ministre du Travail, Jean Boulet, a déposé mardi le projet de loi 19 pour limiter la présence d’enfants sur le marché du travail.

Il a repris la recommandation phare du Comité consultatif du travail et de la main-d’œuvre (CCTM) d’établir à 14 ans l’âge minimal pour travailler.

En clair, si le projet de loi est adopté, les jeunes de 11 ans, 12 ans ou 13 ans ne pourront plus travailler, sauf exceptions: les livreurs de journaux, les gardiens d’enfants, les aides-moniteurs et marqueurs, notamment.

Il sera également interdit aux jeunes entre 14 ans et 16 ans de travailler plus de 17 heures par semaine (incluant la fin de semaine) pendant l’année scolaire. Du lundi au vendredi, ce sera un maximum de dix heures.

Cette limite entrerait en vigueur dès le 1er septembre.

En pleine pénurie de main-d’œuvre, de plus en plus d’enfants se retrouvent sur le marché du travail, avec les risques que cela comporte. 

Leur présence accrue en milieu de travail soulève non seulement des enjeux de santé-sécurité, mais aussi de décrochage scolaire.

De 2017 à 2021, le nombre de lésions professionnelles reconnues par la CNESST est passé de 10 à 64 par année pour les enfants de 14 ans et moins, soit une augmentation de 540 %. 

Pour l’ensemble des enfants de 16 ans et moins, le nombre est passé de 278 à 447 au cours de la même période, soit une augmentation de 60,8 %.

La place d’un enfant, «clairement, pour moi, c’est sur les bancs d’école, puis (…) dans les activités para-académiques», a déclaré le ministre Boulet en conférence de presse.

«Son métier premier, c’est d’être un élève», a-t-il ajouté.

L’impact sur les secteurs de la restauration, de l’hébergement et du commerce au détail sera «très marginal», selon lui. Par exemple, en restauration, les moins de 14 ans représentent 0,48 % du temps travaillé.

Les syndicats et le patronat applaudissent

À l’Assemblée nationale, le porte-parole de Québec solidaire (QS) en matière de travail, Alexandre Leduc, a été le premier à applaudir les mesures contenues dans le projet de loi.

«On a bien fait de ne pas lâcher le morceau et de talonner le ministre du Travail afin que le projet de loi ne comporte pas d’exceptions inacceptables pour le travail des enfants», a-t-il réagi. 

Des centrales syndicales ont également félicité le ministre Boulet d’avoir respecté l’avis unanime du CCTM. Le comité regroupe des syndicats et des associations patronales.

«Enfin, le Québec disposera de balises pour encadrer le travail des jeunes. C’est important pour leur réussite éducative et leur santé physique et psychologique», a déclaré par communiqué le président de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), Éric Gingras. 

«Nous avons socialement la responsabilité d’encadrer le recours au travail des jeunes, tout particulièrement dans le contexte actuel de pénurie de main-d’œuvre», a-t-il renchéri.

La Centrale des syndicats démocratiques (CSD) a pour sa part souligné que «contrairement à ce que certains prétendent», pour un enfant, «le travail n’est pas l’endroit pour s’épanouir». 

«Ce n’est pas normal que des enfants se blessent et même décèdent au travail. Nous devons laisser nos jeunes se développer avant d’arriver dans un milieu de travail», a affirmé le président de la CSD, Luc Vachon.

Même son de cloche du côté du Conseil du patronat du Québec. Son président, Karl Blackburn, a dit vouloir renforcer l’équilibre entre la réussite scolaire des jeunes et leur implication sur le marché du travail.

«Il faudra aussi porter attention aux inquiétudes exprimées par des secteurs d’activités comme la restauration, le commerce de détail et le tourisme», a-t-il cependant averti.

À l’heure actuelle, au Québec, il n’y a pas d’âge minimum pour travailler, contrairement à d’autres provinces. Un jeune de moins de 14 ans qui veut travailler doit cependant avoir le consentement de ses parents.

De plus, en vertu de la Loi sur l’instruction publique, une personne de 16 ans ou moins qui n’a pas obtenu de diplôme ne peut travailler durant les heures de classe. 

Elle peut toutefois travailler tous les soirs de la semaine et toutes les fins de semaine.