Le SPVM enquête sur deux engins incendiaires lancés sur des établissements juifs

MONTRÉAL — Des leaders de la communauté juive de Montréal ont appelé mardi à une condamnation généralisée des bombes incendiaires lancées pendant la nuit contre deux institutions juives, y voyant la plus récente preuve d’antisémitisme dans la métropole.

«Si vous demandez comment se sent la communauté juive, elle ne se sent pas tellement en sécurité», a déclaré en conférence de presse Yair Szlak, président-directeur général de l’organisation juive montréalaise Fédération CJA. «Et je pense qu’il y a beaucoup à faire de la part de nos politiciens, de nos dirigeants, des dirigeants de chaque communauté, pour affirmer que ce n’est pas acceptable.»

Les deux bombes incendiaires lancées dans la nuit de mardi ont causé des dommages mineurs à la porte d’entrée de la synagogue de la Congrégation Beth Tikvah et à la porte arrière de l’édifice voisin de la Fédération CJA, à Dollard-des-Ormeaux, dans l’ouest de l’île. Personne n’a été blessé, puisque les deux bâtiments étaient vides au moment des incidents, a indiqué M. Szlak.

Les deux événements font l’objet d’une enquête du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM). La porte-parole du SPVM, Sabrina Gauthier, a déclaré mardi matin que les enquêteurs n’avaient pas encore déterminé de mobile. Mais ces incidents surviennent dans un contexte de tensions croissantes liées à la guerre au Proche-Orient, déclenchée par une attaque du Hamas contre Israël, le 7 octobre, qui a fait plus de 1400 morts du côté israélien, surtout des civils.

Le nombre de morts palestiniens dus aux frappes israéliennes en représailles a dépassé les 10 000, a déclaré lundi le ministère de la Santé de la bande de Gaza, dirigée par le Hamas.

Le chantre de la congrégation Beth Tikvah, Henry Topas, affirme que ses membres sont horrifiés par ces attaques à l’engin incendiaire, survenues un mois jour pour jour après l’incursion du Hamas en Israël, le 7 octobre.

M. Szlak a qualifié de «jour sombre dans l’histoire juive» l’attaque du Hamas du 7 octobre. «Perpétuer ce crime contre l’humanité par des actes contre la communauté juive partout dans le monde est une erreur, a-t-il dit. Ce qui s’est produit aujourd’hui ne peut pas se reproduire. Ce doit être la dernière fois.»

Le SPVM a enregistré 38 signalements de crimes et d’incidents haineux ciblant la communauté juive montréalaise entre le 7 et le 25 octobre.

Interpellé en mêlée de presse mardi à Québec, le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, a assuré qu’il suivait la situation «de très, très près avec le corps de police de la ville de Montréal principalement, même avec tous les corps de police, pour s’assurer que les différentes communautés se sentent en sécurité et que la population se sente en sécurité».

Adil Charkaoui dénoncé 

Plusieurs politiciens ont écrit sur les réseaux sociaux mardi pour condamner les incidents de Montréal. Le premier ministre Justin Trudeau a déclaré sur la plateforme X, anciennement connue sous le nom de Twitter, que «les tentatives d’incendie criminel à la Fédération CJA et à la congrégation Beth Tikvah dans l’ouest de Montréal sont vraiment troublantes». 

«L’antisémitisme est inacceptable et doit être condamné – et ce gouvernement continuera de combattre cette haine avec les communautés juives», a-t-il écrit.

Eta Yudin, vice-présidente pour le Québec au Centre consultatif des relations juives et israéliennes, était également présente à la conférence de presse de mardi. Elle a dénoncé un discours prononcé par l’imam Adil Charkaoui lors d’un récent rassemblement pro-palestinien au centre-ville de Montréal. 

Dans une vidéo publiée sur son compte TikTok, M. Charkaoui récite une prière en arabe et appelle Dieu à «se charger des sionistes agresseurs», ajoutant «Ô Dieu, assure-toi de n’en laisser aucun». 

Mme Yudin se demande comment M. Charkaoui a pu se rendre à une manifestation, «comment il a eu la possibilité de s’exprimer dans les rues de Montréal».

«Nous savons très bien que les paroles mènent aux actes, a poursuivi Mme Yudin. Un tel commentaire pourrait inciter à l’action. Et c’est ce que nous ne voulons pas dans les rues de Montréal. Nous comptons sur les autorités pour (…) faire le nécessaire afin de protéger notre société. Mais en même temps, il faut que tout le monde dénonce cette haine, ces propos.»

S’adressant aux journalistes à Québec, le premier ministre François Legault a qualifié d’«incitation à la haine, à la violence» les propos de M. Charkaoui. «Je compte sur les policiers pour faire leur travail, a-t-il dit. Ce n’est pas à moi de leur dire comment faire leur travail, mais inciter à la violence, ce n’est pas permis.»