Un terrain de golf devenu un cimetière écoforestier dans les Laurentides

MONTRÉAL — Un ancien terrain de golf de Sainte-Sophie, dans les Laurentides, devient un cimetière écoforestier où à terme plus de 7000 arbres pourront grandir en mémoire d’un proche, au lieu d’une sépulture. 

Forêt de la seconde vie, qui borde la rivière Achigan, se veut une option écologique dans le milieu des services funéraires. 

Le site serait le premier cimetière accrédité comme producteur forestier en Amérique du Nord. Ce qui signifie que le lieu est doté d’un plan d’aménagement pour la création d’une nouvelle forêt, qui assure ainsi une croissance saine de celle-ci, explique la directrice de Forêt de la seconde vie, Fannie Tremblay. 

Il serait aussi le seul site permettant l’inhumation de cendres greffé à une servitude de protection de la nature.

«On a collaboré avec des ingénieurs forestiers et des organismes à but non lucratif, dans le but que notre forêt soit protégée à perpétuité et de garantir vraiment un espace paisible pour les familles», mentionne Mme Tremblay en entrevue. 

Depuis lundi, les personnes voulant inhumer les cendres d’un proche ou planifier leurs arrangements funéraires peuvent y réserver une «concession commémorative» d’environ 200 pieds carrés où s’enracinera un arbre.

L’entreprise propose 25 choix d’essences d’arbres réparties dans cinq zones différentes. En collaboration avec l’organisme la Table forêt Laurentides, elle a retracé l’historique de chacun d’eux, et ce qu’ils représentent. 

«On a effectué une recherche pour qu’au-delà de la symbolique de l’arbre, d’aller rattacher la symbolique de l’humain derrière; les valeurs qui viennent un peu de nous attacher à cet arbre-là, afin que ce soit significatif pour chaque personne», affirme Mme Tremblay. 

Un legs pour l’environnement

Le cimetière Forêt de la seconde vie a été cofondé par Ritchie Deraiche, qui travaille en immobilier, et Guillaume Marcoux, provenant du milieu de l’aménagement urbain et du développement du territoire. 

Aucun d’eux n’a oeuvré dans le domaine funéraire. Leur intention de départ en achetant ce vaste terrain de 2,5 millions de pieds carrés, en 2019, était de trouver une façon de conserver les zones boisées et les grandes prairies existantes. 

C’est au regard des prévisions qui laissent entrevoir que le cap symbolique des 100 000 décès annuels serait atteint en 2043 au Québec que les deux hommes ont décidé de développer le concept d’un cimetière écoforestier. 

En plus de commémorer la mémoire d’êtres chers, il permet de créer de nouvelles zones forestières dans un contexte de lutte au changement climatique. 

L’entreprise fait valoir qu’en «considérant la taille moyenne de nos concessions, la plantation annuelle de 100 000 arbres représenterait la préservation de plus de 19 millions de pieds carrés de forêt par an si tous adhéraient au service». 

Sur son site web, l’organisation évoque aussi que «des études démontrent qu’un arbre absorbe en moyenne 25 kg de CO2 par an».

«Dans l’équipe, on est tous des parents de très jeunes enfants. On voulait alors faire une différence en protégeant cette forêt-là et en venant reboiser le site. On entend souvent qu’il faut agir pour les changements climatiques, l’urgence, elle est présente. On voulait donc vraiment apporter notre grain de sel», témoigne Mme Tremblay, qui est impliquée dans la conception du projet depuis environ trois ans. 

Application interactive 

Tout a été réfléchi afin de limiter au maximum l’empreinte écologique. Les cendres peuvent être directement enterrées sous l’arbre choisi. Elles seront alors mélangées avec de la mycorhize pour aider le système racinaire de l’arbre, explique Mme Tremblay. 

Les familles ont aussi l’option de mettre en terre les cendres dans une urne biodégradable. 

Toujours dans le souci de protéger l’environnement, aucune inscription physique ne sera affichée sur les arbres. L’entreprise a plutôt développé une application mobile afin de retrouver son lot commémoratif. 

En plus de l’identification de l’emplacement, l’outil permettra d’intégrer des informations sur celui ou celle qui y repose, dans ce qui est appelé «un coffre virtuel», pouvant contenir une banque de souvenir comme des photos et des vidéos, ou des moments marquants de sa vie. 

«On voulait personnaliser l’information, puis humaniser aussi le processus que les gens vivent à travers le deuil. C’est de pouvoir transmettre aux générations futures un peu plus qu’une date de décès et une date de naissance sur des monuments funéraires conventionnels», soutient Mme Tremblay. 

Forêt de la seconde vie, qui dit avoir collaboré avec des entreprises funéraires ou des organismes soutenant des personnes en deuil, aimerait éventuellement étendre le concept dans d’autres régions du Québec.