Une arbitre ordonne la réintégration en emploi d’une camionneuse alcoolique

MONTRÉAL — Une entreprise de camionnage québécoise a reçu l’ordre de réintégrer une employée ayant été congédiée après avoir bu au moins neuf bières avant de perdre le contrôle de son camion sur une autoroute de Pennsylvanie.

Les actions de la conductrice constituaient une faute grave, mais sa consommation d’alcool était le résultat d’une maladie — l’alcoolisme — et Groupe Robert aurait dû lui proposer un accommodement raisonnable, écrit l’arbitre du travail Huguette April dans sa décision écrite du 18 juillet.

«La nuit de l’accident (l’employée) avait besoin de boire, rappelle Mme April. Elle a admis que même si elle savait qu’elle ne devrait pas le faire, le besoin était plus fort, comme quelque chose qu’elle ne pouvait pas contrôler.»

La femme a été congédiée après avoir été impliquée dans un accident le 30 juin 2022. Le camion a été endommagé, mais l’accident n’a fait aucun blessé.

Les faits de l’affaire indiquent que la camionneuse s’est arrêtée deux fois pour acheter des caisses de six cannettes de bière alors qu’elle se rendait d’une banlieue de Montréal à la Pennsylvanie. La femme a admis avoir bu au moins neuf bières pendant le voyage, mais elle ne se souvenait pas si elle avait bu les trois dernières sur la route. 

Après l’accident, elle a été arrêtée avec un taux d’alcoolémie de 0,18, soit plus du double de la limite légale.

La camionneuse a parlé à son employeur de son alcoolisme environ une semaine après l’accident et du fait qu’elle a demandé de l’aide médicale pour arrêter de boire. Elle a été officiellement licenciée le 31 août, après avoir terminé un programme de traitement de la toxicomanie en milieu hospitalier.

Mme April a déclaré qu’il n’y avait aucune preuve que le Groupe Robert avait demandé ou vérifié si son employé en difficulté souffrait d’alcoolisme.

L’ex-employée a plaidé devant l’arbitre que l’entreprise aurait pu installer un appareil de test d’alcoolémie dans son camion après l’accident ou lui trouver un autre travail dans son organisation.

Le Groupe Robert a indiqué à l’arbitre que la salariée avait contrevenu à la convention collective qui stipulait que les camionneurs qui buvaient au travail seraient congédiés.

«Chez Groupe Robert, la sécurité de tous les usagers de la route est notre priorité absolue», a écrit lundi le porte-parole de l’entreprise, Kim Leclerc, dans un courriel, en précisant que la décision de licencier la camionneuse «n’a pas été prise à la légère».

«Nous avons la responsabilité envers la communauté de veiller à ce que nos employés respectent les normes de sécurité les plus élevées», a indiqué M. Leclerc.

Marc-André Gauthier, porte-parole de Teamsters Canada, le syndicat qui représente la conductrice et qui a contesté son congédiement, a affirmé qu’il a l’obligation de défendre ses membres en matière de travail, quelles que soient les circonstances.

La sécurité routière est une priorité pour le syndicat, a-t-il fait savoir dans un courriel, lundi.

«Nous encourageons les conducteurs à respecter les lois sur la conduite et les entreprises de transport à mettre en place les politiques et les outils nécessaires pour permettre à leurs employés d’exercer leur profession en toute sécurité», a-t-il écrit, ajoutant que le syndicat ne peut commenter davantage, car l’entreprise fait appel de la décision de l’arbitre.

Note aux lecteurs: Dans une version précédente, La Presse Canadienne identifiait Kim Leclerc comme la porte-parole de Groupe Robert. Il faut bien lire, le porte-parole et changer les pronoms de Kim Leclerc. Nos excuses.