La politique de vaccination dans l’armée violait les droits, selon un comité

OTTAWA — Un tribunal qui fait partie du processus de règlement des griefs militaires a conclu qu’une politique de vaccination contre la COVID-19 violait les droits de la Charte des membres des Forces armées canadiennes (FAC).

Le Comité externe d’examen des griefs militaires examine les griefs qui lui sont renvoyés par le chef d’état-major de la Défense, et lui, fournit en retour des conclusions et des recommandations non contraignantes.

Au total, 157 griefs ont été déposés auprès du tribunal indépendant concernant la politique de vaccination des militaires, qui est entrée en vigueur à l’automne 2021 et qui est demeurée en vigueur pendant près d’un an avant d’être mise à jour pour s’appliquer plus étroitement.

Des dizaines de griefs similaires ayant été examinés en même temps, le comité a pris l’initiative de publier à la mi-juillet trois annexes qui exposaient son analyse afin de rationaliser les cas futurs.

Directives

La politique sur les vaccins exigeait que les membres des Forces armées canadiennes soient vaccinés contre la COVID-19 ou placés en congé forcé.

Selon la première directive du chef d’état-major de la Défense, 91% des membres des Forces armées avaient déjà choisi de se faire vacciner, et elle a donné aux membres jusqu’en novembre 2021 pour déclarer s’ils étaient complètement vaccinés ou s’ils ne voulaient pas ou ne pouvaient pas se faire vacciner.

Ceux qui ne pouvaient pas se faire vacciner devaient être hébergés en vertu de la Charte des droits, mais ceux qui choisissaient de ne pas le faire étaient avertis qu’ils pourraient perdre des opportunités de promotion, de formation et de déploiement ou être renvoyés.

Toute personne qui n’a pas divulgué son statut ou qui a refusé un vaccin pourrait faire face à des mesures administratives correctives, ou elle pourrait choisir d’être renvoyée ou transférée à la Réserve supplémentaire.

Une autre directive de décembre 2021 stipulait que les membres non vaccinés pouvaient être libérés en vertu d’une disposition indiquant qu’ils n’étaient pas aptes au service.

Lorsque la politique a pris fin en octobre dernier, 299 personnes avaient été mises en congé et 108 autres avaient démissionné.

Le mandat initial de vaccination, en octobre 2021, est intervenu après la mise en place d’une politique similaire pour l’administration publique centrale, y compris la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et les employés du ministère de la Défense nationale.

Dans une entrevue accordée à La Presse Canadienne en octobre dernier après la levée du mandat, le général Wayne Eyre, chef d’état-major de la Défense, a relaté que les militaires devaient suivre les ordres légaux et qu’un refus répété de certains soldats de se faire vacciner «soulève des questions sur votre aptitude à servir en uniforme».

«C’est dangereux dans l’armée de désobéir aux ordres légaux, a-t-il déclaré. C’est une pente très glissante.»

Limitations injustifiées

Le comité d’examen externe a rendu des conclusions dans trois cas de grief à la fin du mois de mai.

Le comité a conclu que la politique violait les droits protégés par l’article 7 de la Charte, qui garantit la vie, la liberté et la sécurité de la personne. Il a conclu que les restrictions apportées à ces droits n’étaient pas conformes aux principes de justice fondamentale.

Le tribunal a également déterminé que les limitations n’étaient pas justifiées en vertu de l’article 1 de la Charte, qui stipule que les droits et libertés sont soumis à des limites raisonnables.

Nina Frid, membre du comité qui a rédigé l’analyse, a constaté que s’il y avait une justification pour l’obligation de se faire vacciner parce que «la science montre que les vaccins contre la COVID-19 sont efficaces pour réduire la probabilité de tomber gravement malade ou de mourir de cette maladie», la politique faisait une distinction arbitraire entre les personnes qui ne pouvaient pas se faire vacciner et celles qui choisissaient de ne pas recevoir le vaccin.

Mme Frid a également écrit que la politique était «trop large» et que sa mise en œuvre était «disproportionnée».

«La caractérisation selon laquelle les membres qui ne veulent pas se faire vacciner font preuve d’inconduite est en contradiction avec les propres politiques et déclarations préexistantes des FAC qui garantissent également le choix de leurs membres en matière de traitement médical», a-t-elle écrit.

Le comité recommande que toutes les mesures administratives prises contre les membres qui ont refusé de se faire vacciner soient annulées et, dans un cas, il demande qu’un plaignant soit autorisé à réintégrer l’armée.

Processus en cours

Le général Eyre prendra les décisions finales dans les affaires et, en tant que chef d’état-major de la Défense, il n’a pas à suivre ces recommandations.

Dans une déclaration écrite, le ministère de la Défense a déclaré qu’il était important de noter que le processus n’est pas terminé tant que l’examen du général Eyre n’est pas terminé.

«Les FAC prennent leurs décisions sur la vaccination en tenant compte des preuves et des conseils médicaux les plus récents, de la posture fédérale actuelle et de la nécessité d’être opérationnellement prêts en termes de santé de la force et de capacité à agir dans un environnement où tout vaccin-maladie évitable est un danger pour les individus et la mission», a déclaré la porte-parole Jessica Lamirande.

Elle a souligné que plus de 96 % des membres des forces armées sont vaccinés contre la COVID-19.

«Les membres des FAC sont régulièrement vaccinés contre un certain nombre de maladies — du choléra à la fièvre jaune —, et ce, avant leur déploiement», indique le communiqué.