Les Canadiens ukrainiens manifestent et exhortent Ottawa à une riposte ferme

MONTRÉAL — Des drapeaux jaunes et bleus ont flotté dans les villes du Canada jeudi alors que des Canadiens d’origine ukrainienne manifestaient pour dénoncer l’attaque de la Russie contre l’Ukraine et exhortaient Ottawa à agir rapidement pour défendre leur patrie.

À Montréal, plusieurs dizaines de manifestants se sont rassemblés devant l’Université McGill, brandissant des pancartes avec des messages allant de «Je veux voir ma grand-mère vivante» au plus militariste «Armez l’Ukraine».

Larysa Grynko, qui est arrivée au Canada en provenance d’Ukraine en 2011, était l’une des nombreuses personnes qui ont aidé à déployer une grande banderole aux couleurs ukrainiennes du bleu et du jaune. La voix tremblante, elle s’est dite «dévastée» par les événements.

«Les mots ne peuvent décrire la terreur que nous ressentons pour les familles qui restent en Ukraine», a-t-elle déclaré. Mme Grynko a affirmé qu’elle avait parlé à sa famille, qu’ils étaient en sécurité pour le moment et qu’ils avaient confiance en l’armée ukrainienne.

Elle est brièvement passée à l’ukrainien pour délivrer un message en larmes qui, selon elle, signifiait : «Soyez en sécurité et soyez forts». En anglais, elle a exhorté le Canada à ne pas négliger le risque posé par l’agression russe.

«Si la Russie n’est pas stoppée en Ukraine, elle ne s’arrêtera pas en Ukraine, a-t-elle déclaré. Elle ira plus loin, en agressant d’autres pays.»

Plusieurs villes canadiennes, dont Calgary et Montréal, ont indiqué qu’elles arboreraient le drapeau ukrainien sur les édifices municipaux. Des manifestations étaient également prévues à Toronto, Vancouver et Edmonton pour dénoncer l’offensive militaire russe.

Yaroslav Broda, vice-président de la section d’Edmonton du Congrès ukrainien canadien, a déclaré que le rassemblement devant l’Assemblée législative de l’Alberta jeudi serait une occasion pour les gens de la communauté de se réunir et de sensibiliser le public à l’agression russe qui se déroule en Ukraine depuis des années.

«Il s’agit de solidarité, car nous ne pouvons pas faire grand-chose là où nous sommes», a-t-il déclaré.

M. Broda a indiqué qu’il avait des tantes, des oncles et des cousins qui vivaient en dehors de la capitale, Kiev. L’homme de 28 ans a déclaré que ses cousins, qui ont à peu près son âge avec des enfants, ont fui la région, mais que les membres de la famille de la génération de ses parents ont décidé de rester.

Il a déclaré que les tensions avec la Russie s’étaient intensifiées et refroidies au cours de la dernière décennie et que les gens sur le terrain devenaient insensibles au conflit. «Je suis sûr qu’il y a eu beaucoup de hochements de tête ce matin (jeudi), a dit M. Broda. Ils sont allés se coucher en pensant que c’était juste un autre jour à côté de la Russie, mais maintenant ils ont réalisé que c’était parti.»

Michael Shwec, le directeur de la branche québécoise du Congrès ukrainien canadien, affirme que le monde entier a le devoir de se rallier à la cause de l’Ukraine.

Il a dit qu’un manque d’action ferme en réponse à l’agression russe enverrait un signal à d’autres pays autoritaires et pourrait causer des problèmes aux démocraties du monde entier.

«Il n’y a pas de capitulation. Il n’y a pas d’apaisement. Cela ne fonctionne pas, a-t-il déclaré lors d’un entretien téléphonique. Parce que si nous ne faisons rien maintenant, il y a d’autres pays dans ce monde qui ont des ambitions très similaires à celles (du président russe Vladimir Poutine).»

«Aujourd’hui, le monde libre doit se rallier à la cause des Ukrainiens. Aujourd’hui, quiconque valorise les droits de l’homme, la démocratie et la liberté est un Ukrainien», a-t-il ajouté.

M. Shwec dit qu’il demande au Canada de réagir avec les sanctions les plus sévères possibles, ainsi qu’avec un soutien matériel comme des armes antiaériennes et des systèmes de défense navale.

Il indique que son organisation rencontrera également des responsables fédéraux, provinciaux et municipaux pour discuter des plans de réinstallation des réfugiés ukrainiens qui chercheront un endroit sécuritaire où vivre.

Dinara, une étudiante russe de 24 ans, se tenait au rassemblement de Montréal avec une petite pancarte indiquant «Les Russes contre la guerre en Ukraine». Elle a dit qu’elle voulait montrer son soutien à ses amis ukrainiens, mais aussi protester contre la guerre au nom d’autres Russes qui n’osent pas sous le régime de Poutine.

«Ils ne sont pas en mesure de protester ou de faire quoi que ce soit en Russie, alors je me tiens ici pour protester contre l’action du gouvernement», a-t-elle déclaré.

Dinara, qui n’a pas voulu donner son nom de famille parce qu’elle s’inquiète des répercussions sur sa famille en Russie, a déclaré qu’elle pensait que la plupart des Russes s’opposaient à la guerre. «Nous ne soutenons pas une guerre, nous sommes contre le régime et c’est le sentiment général, je crois, a-t-elle déclaré. C’est juste que nous ne pouvons pas l’exprimer chez nous.»

— Avec des informations de Daniela Germano à Edmonton